lundi 18 mars 2013

Comment la police relève le défi des gangs à Marseille - Le Figaro

Marseille, o les marins-pompiers ont retrouv dans la nuit de vendredi samedi dernier un corps calcin et cribl de balles dans une voiture, peine se dfaire de ses vieux dmons. Face aux rglements de comptes qui ensanglantent la ville et sment la psychose dans ses quartiers, les forces de l'ordre ne baissent cependant pas la garde. Au contraire, sous l'impulsion du prfet de police Jean-Paul Bonnetain, leurs mthodes amorcent une rvolution pour reconqurir le terrain. Quartier par quartier. Un travail titanesque, tant certains secteurs de la Cit phocenne sont gangrens jusqu' la moelle. Selon nos informations, au moins une vingtaine de gros points de vente de rsine de cannabis y seraient recenss, pouvant gnrer pour certains jusqu' 5000euros de bnfice par jour. Dirigs par d'insaisissables cads ayant 40ans au plus, ils font travailler des dizaines de dealers, appels charbonneurs, empochant quotidiennement 500euros, une nue de chouffeurs de 15ans peine, qui font le guet contre un ou deux billets de 50euros la journe, ainsi que des nourrices, qui stockent la marchandise par kilos leur domicile.

Capter le moindre tuyau

Pour gagner la bataille contre le grand banditisme, nous avons rorganis en profondeur nos services pour mettre le paquet sur le recueil de l'information au plus proche du terrain et briser l'omerta protgeant les trafics, confie au Figaro l'inspecteur gnral Pierre-Marie Bourniquel, commissaire central de Marseille et directeur dpartemental de la Scurit publique. Grce un renfort de 145fonctionnaires en septembre dernier, une indite division du renseignement oprationnelle, compose de 23agents spcialiss, cume de jour comme de nuit les quartiers nord et sud de la ville pour capter le moindre tuyau auprs des cafetiers, gardiens d'immeuble, victimes d'agressions, petits dlinquants recruts comme indics et policiers de quartier. Comme il est rarissime que l'on nous livre le nom d'un trafiquant ou la date d'une livraison de drogue sur un plateau, cette collecte mene tous azimuts fait l'objet de tris et de recoupements pour reconstituer petit petit le puzzle des filires, confie Pierre-Marie Bourniquel, qui prne une rvolte citoyenne des Marseillais et le dveloppement de rapports fusionnels entre les services.

Chaque semaine, dsormais, deux ou trois notes confidentielles, agrmentes de noms de suspects et photos de surveillance, sont transmises par la Scurit publique un nouveau groupe de recueil et d'analyse du renseignement criminel de la PJ afin d'orienter les investigations sur le fond. Aprs le cataclysme des ripous de la BAC nord, qui a branl l'institution, l'heure est l'union sacre. Trop longtemps, les "semi-grossistes" alimentant un ou deux quartiers coups de 40 ou 50kg de came prospraient, car ils taient la fois trop gros pour les policiers de quartier et trop petits pour les services spcialiss verss dans les dmantlements de trafics internationaux, prcise-t-on la prfecture de police. Dsormais, trois groupes de la PJ les prennent en charge, tandis que deux cellules spcifiques cres au sein de la Scurit publique labourent les cits et multiplient les procdures en bton.

Selon un dernier bilan, plus d'une tonne de cannabis, 19kg de cocane, une trentaine d'armes, dont huit kalachnikovs, ainsi que des grenades et des gilets pare-balles ont t saisis en opration depuis janvier dernier. Les interpellations, qui ont bondi de 30% en un an, ont entran l'incarcration de 32trafiquants prsums dans la mme priode. Les saisies d'avoirs criminels, qui frappent les voyous au portefeuille, ont dj atteint les 235.000euros. Soit dj plus que les 220.000euros confisqus pour toute l'anne 2012.

Soucieuse d'intensifier la traque, la police marseillaise joue aussi sur tous les tableaux. Mme les plus surprenants. Ainsi, les 22policiers VTTistes, auteurs de 450interpellations en tous genres ces deux derniers mois, vont doubler leurs effectifs ds lundi prochain. De leur ct, trente de leurs collgues motos, surnomms les ninjas en raison de leur tenue noire et de leur bton tonfa dans le dos, sillonnent par trois les cits la recherche permanente du flagrant dlit. Des chiens renifleurs de graisse d'arme, trs recherchs, ont t mobiliss. Pour viter que les cits thtres d'oprations coup de poing ne retombent le lendemain ou le surlendemain entre les mains des narcocads, le prfet de police dveloppe une politique d'approche globale visant y dployer, pendant plusieurs semaines, une compagnie rpublicaine de scurit ou un escadron de gendarmerie mobile. Objectif: asphyxier le march en verrouillant l'accs aux lieux de deal et en multipliant les contrles d'identit des clients potentiels.

Depuis dcembre, huit sites sensibles, dont le quartier Bassens dans le XVearrondissement, ont dj fait l'objet de cette thrapie de choc. Quelque 300personnes y ont t apprhendes, dont un quart pour des affaires de stups et 280automobilistes y ont subi un dpistage toxicologique, 20% d'entre eux tant positifs.

Une fois le quartier trait policirement, les paves de voitures sont enleves et les bailleurs sont appels la rescousse pour repeindre les cages d'escaliers et remettre l'clairage. Et les travailleurs sociaux, pauls par Ple emploi, rinvestissent les lieux pour retisser un tissu social souvent en lambeaux. Une rflexion est souhaite afin de mieux sensibiliser les juges d'applications des peines, observe un commissaire. Ils font bnficier des voyous de rduction de peines, sans savoir que ces derniers continuent diriger leur business depuis leur cellule et qu'ils n'attendent leur libration que pour rcuprer leur territoire par les armes. L'an dernier, comme les policiers les appellent pudiquement, les dommages collatraux se sont solds par 24assassinats.

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