samedi 9 mars 2013

L'ambition du Grand Paris, malgré la crise - Le Monde

L'on dplore trop souvent la dictature de l'urgence qui pse sur les responsables politiques pour ne pas saluer, quand ils se produisent, les desseins stratgiques et les dcisions ambitieuses.

C'est le cas du chantier du Grand Paris. Lanc ds 2007 par Nicolas Sarkozy, il est repris son compte, pour l'essentiel, par l'actuel gouvernement, au prix d'une coquetterie inutile consistant le rebaptiser "Nouveau Grand Paris". Le premier ministre, Jean-Marc Ayrault, l'a annonc le 6 mars, au grand soulagement de ceux qui craignaient un enlisement du projet.

D'une prsidence l'autre, le diagnostic est le mme : Paris touffe dans des frontires inchanges depuis un sicle et demi. Faute d'une vision globale, la rgion-capitale ne parvient plus, depuis longtemps, traiter la bonne chelle des problmes aussi cruciaux que les transports (surchargs), le logement (insuffisant), la crise des banlieues (rcurrente) et la comptitivit d'une mtropole qui n'a plus les moyens de rivaliser avec les grandes capitales mondiales. L'enjeu est crucial pour une rgion qui concentre une dizaine de millions d'habitants et 30 % de la richesse nationale.

Lentement, laborieusement mais srement, la rponse ces dfis s'est prcise depuis cinq ans. D'une part, faire merger de puissants ples de comptitivit (sciences et technologie sur le plateau de Saclay, sant Villejuif, cinma Saint-Denis-Pleyel, aronautique Roissy-Gonesse, etc.). D'autre part, relier ces ples entre eux – et avec le centre de Paris – grce un nouveau rseau de transport francilien en rocade, soit au total 200 kilomtres de mtro supplmentaires et 72 gares dsenclavant bon nombre de banlieues. Enfin, profiter de cette dynamique pour doubler, ou davantage, le nombre de logements construits dans la rgion (70 000 par an au lieu de 30 000 aujourd'hui).

Projet de rseau de transport public du Grand Paris.

Ce projet d'amnagement trs ambitieux a donc t confirm. La mtropole parisienne n'en avait pas connu de semblable depuis un demi-sicle. Bravo !

Il n'en soulve pas moins de srieuses questions. La premire tient sa ralisation. Les retards l'allumage autant que le cot du Grand Paris ont conduit le premier ministre taler sur cinq annes supplmentaires l'achvement du nouveau super-mtro : 2030, au lieu de 2025. Mme si un calendrier prcis de construction, ligne par ligne, est dsormais fix, l'horizon est lointain, surtout par temps de crise.

La seconde porte sur le financement. Entre la modernisation de lignes existantes et la construction de nouvelles, le budget global a t rvalu prs de 32 milliards d'euros. C'est un effort colossal en priode de disette budgtaire. Pour y parvenir, le gouvernement a prsent un montage complexe, mettant contribution Etat, collectivits et entreprises. Reste le boucler effectivement, et sur le long terme.

Enfin, la question de la "gouvernance" de cet norme projet n'est qu'esquisse. Le principe d'une "Mtropole de Paris" a t pos. Mais il est loin d'tre mis en oeuvre : la rgion Ile-de-France rencle, les communes craignent de se voir dpossder de leurs prrogatives en matire de logement, et beaucoup craignent une de ces usines gaz dont notre organisation territoriale a le secret.

Reste, pour l'heure, l'essentiel : la dmonstration que la crise n'empche pas d'inventer l'avenir.

Lire : Grand Paris : 200 km de mtro, 72 gares d'ici 2030

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire