mardi 24 septembre 2013

Paris réaffirme sa volonté d'obtenir une résolution ferme contre Damas - Le Monde

Le ministre des affaires trangres franais Laurent Fabius et son homologue russe Sergei Lavrov.

Quelle place pour Franois Hollande lors de l'Assemble gnrale des Nations unies qui s'ouvre, mardi 24 septembre, New York ? Aprs le retournement diplomatique subi sur le dossier syrien, le chef de l'Etat, qui ambitionne de positionner la France comme un "pays qui a un message dlivrer au monde, des valeurs, des principes et une influence internationale", sera-t-il en mesure d'y faire entendre sa voix ? A l'approche du sommet, ce n'est pourtant pas lui, mais bien le prsident iranien, Hassan Rohani, qui semble devoir en tre la vedette.

Ces derniers jours, ce religieux que l'on dit modr, lu en juin, a men une vritable offensive de charme en laissant entendre que Thran serait enclin des concessions sur les deux dossiers qui dominent l'agenda diplomatique international : la Syrie, dont l'Iran est un fidle alli, et le volet militaire de son programme nuclaire. Les spculations n'ont cess d'enfler sur une possible poigne de main, en marge de l'assemble, entre MM. Rohani et Obama. Un geste qui marquerait un profond tournant, aprs plus de trente ans de tensions entre la Rpublique islamique et les Etats-Unis.

Seule certitude pour l'instant, le prsident iranien s'exprimera la tribune des Nations unies, mardi, le mme jour que Barack Obama et Franois Hollande. Le chef de l'Etat franais rencontrera ensuite M. Rohani. A l'Elyse, on demeure cependant prudent quant aux retombes attendre de ce tte--tte, dont on a d'emble pris soin de souligner qu'il avait t sollicit par la Rpublique islamique. "Le prsident Rohani a fait preuve d'une relative ouverture", remarque un conseiller, qui souligne nanmoins que M. Hollande entend aborder le "rle ngatif" jou par l'Iran en Syrie, au Liban et en Afghanistan.

QUEL "DEGR DE CONTRAINTE" SUR LA SYRIE ?

La mme prudence est de mise sur la crise syrienne, qui dominera l'ordre du jour de cette Assemble gnrale. Toute l'attention, pendant la semaine, va se porter sur les laborieuses ngociations engages au Conseil de scurit sur les termes d'une rsolution destine encadrer le dmantlement de l'arsenal chimique du rgime de Bachar Al-Assad. Au centre des discussions, le "degr de contrainte" exerc sur la Syrie, qui, selon l'Elyse, "doit tre maximal ". Un glissement du dbat qui illustre quel point la donne diplomatique a t chamboule en l'espace de quelques semaines. Et combien la France en a t carte.

Pourtant, aprs l'attaque chimique du 21 aot dans les faubourgs de Damas, des frappes franco-amricaines sur la Syrie semblaient imminentes. Mais la proposition russe de mise sous tutelle internationale des armes chimiques syriennes, formule la surprise gnrale le 9 septembre, a affaibli la justification d'une intervention militaire. Autant dcontenances que secrtement soulages par cette initiative qui loignait la perspective d'une guerre impopulaire dans les opinions europenne et amricaine, les chancelleries occidentales sont prises de court.

Laurent Fabius, le ministre franais des affaires trangres, contre-attaque aussitt en dposant l'ONU, ds le 10 septembre, un projet de rsolution offensif. Paris demande non seulement un cadre contraignant pour contrler le dispositif chimique syrien, plac sous le chapitre VII de la Charte des Nations unies qui autorise un recours la force en cas de manquements aux engagements, mais aussi des sanctions contre les commanditaires de l'attaque du 21 aot, passibles de la Cour pnale internationale (CPI).

A l'Elyse, on se flicite du rle moteur jou par la France : "La menace de frappes a contraint le rgime syrien et son protecteur russe bouger." La prcipitation avec laquelle Moscou a mis son plan sur la table "prouve quel point la diplomatie russe tait en panique", observe CamilleGrand, le directeur de la Fondation pour la recherche stratgique (FRS). Mais Washington, qui n'a pas t consult sur la teneur de cette rsolution franaise, n'est visiblement pas sur la mme longueur d'onde.

LA FRANCE SEMBLE SOUDAINEMENT HORS JEU

Quatre jours plus tard, le 14 septembre, les chefs de la diplomatie amricaine et russe, John Kerry et Sergue Lavrov, concluent Genve un accord sur la destruction des armes chimiques syriennes. Le texte ne fait aucune mention de la CPI et le recours au chapitre VII ne devient plus automatique. Selon l'accord, le pilotage de l'opration est confi l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC), base aux Pays-Bas, seule habilite constater les entraves l'accord et demander, le cas chant, une nouvelle saisine du Conseil de scurit. Instance au sein de laquelle la Russie dispose d'un droit de veto...

Saisissant retournement : la Russie, qui risquait d'tre marginalise en cas de frappes contre son alli syrien, a spectaculairement repris la main sur le calendrier des ngociations et sur les modalits de rglement de la crise chimique. La France, encore en pointe quelques jours plus tt, semble soudainement hors jeu. "Le prsident a demand la dfense de mettre en place une capacit d'intervention, maintient le ministre de la dfense, Jean-Yves le Drian. S'il en dcide, nous sommes prts." Mais plus les ngociations durent, plus la perspective d'une sanction militaire contre Damas s'loigne. "L'tirement du calendrier rduit la possibilit de recourir des frappes", concde-t-on au Quai d'Orsay.

A la veille de l'Assemble gnrale de l'ONU, John Kerry a incit le Conseil de scurit obtenir une dcision "rapide" sur la mise en oeuvre de l'accord russo-amricain. Seule avance : la Syrie a fourni une premire liste d'armes chimiques l'OIAC. Pour le reste, les tractations sont au point mort. "On finirait par oublier, parce qu'il y a eu un accord, le rapport des inspecteurs et le fait qu'il y a eu utilisation des armes chimiques. Il faut traiter ce fait pour ce qu'il est", proclame un proche du prsident Hollande.

Le plus probable demeure pourtant que la future rsolution, si rsolution il y a, sera trs loigne de celle initialement propose par la France. A l'Elyse, on le concde demi-mot : "On peut avoir du chapitre VII sans que cela soit crit, souligne un conseiller. Ce qui compte, c'est la robustesse des mesures pour sanctionner le rgime syrien s'il contrevient ses obligations." La partie est loin d'tre termine.

Lire aussi : Syrie : la Russie pourrait changer de position

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