dimanche 8 septembre 2013

Marseille at-elle toujours été aussi violente ? - Le Monde

Sur une scne de crime prs de l'opra de Marseille, le 1er septembre.

"Marseille, toujours Marseille !" Dans l'entourage du ministre de l'intrieur, Manuel Valls, la lassitude le dispute l'agacement. Deux hommes, dont le fils du directeur sportif de l'Olympique de Marseille, Jos Anigo, ont t tus par balle jeudi 5 septembre. Au total, quinze personnes sont mortes dans des rglements de comptes similaires dans le dpartement des Bouches-du-Rhne. Elles taient dix-neuf la mme poque l'an pass.

Si la violence de ces meurtres n'en finit pas de dfrayer la chronique, elle dissimule une certaine constance. Aprs une anne 2012 particulirement sanglante, les statistiques de 2013 tendent se rapprocher de celles publies depuis 2008 par l'Observatoire national de la dlinquance et des rponses pnales (ONDR). Cet organisme public, cr en 2003 et dpendant de l'Institut national des hautes tudes de la scurit et de la justice (Inhesj), collecte les donnes issues des "premires qualifications pnales" enregistres par les services de police.

Son prsident, Christophe Soullez, souligne que "sur les douze derniers mois (chiffres arrts en juillet 2013), seize rglements de comptes ont t enregistrs dans les Bouches-du-Rhne, contre vingt-quatre durant la priode prcdente". Une tendance dont se flicite le nouveau procureur de la Rpublique de Marseille, Brice Robin. D'aprs ses services, les "atteintes volontaires l'intgrit physique" ont baiss de 13 % (10 000 au lieu de 12 000) et les "violences physiques crapuleuses" de 16 % (5 000 au lieu de 6 000).

"Des faits divers, il y en aura sans doute encore. Ils ne doivent pas masquer les premiers rsultats engrangs depuis un an", insiste-t-on Matignon, aprs le dploiement de deux cent trente-cinq policiers supplmentaires dans la ville.

Lire : "Le gouvernement avance l'ide d'un 'pacte national' pour Marseille"

La rgion reste pourtant l'une des plus dangereuses de France, comme le rappelait rcemment La Provence dans un article consacr un rapport sur la criminalit et la dlinquance se fondant sur les chiffres de la direction centrale de la police judiciaire.

"Il se commet deux fois plus de vols main arme (avec une arme feu) Marseille qu' Lyon ou Paris. On en dnombre 249 dans la cit phocenne (0,28 pour 1 000 hab.), 137 Lyon et 304 Paris (0,13 pour 1 000 hab. pour les deux villes).

"Premire marche encore pour Marseille s'agissant des vols avec violences (9 615 agressions sans arme, soit 10,8 pour 1 000 hab.) contre 2 938 Lyon (2,87 pour 1 000 hab.) et 16 125 Paris (7,11 pour 1 000 hab.)."

Mais, malgr cet inquitant palmars, les Bouches-du-Rhne ne sont pas le dpartement le plus criminogne de France. Eu gard au taux d'infractions pour 1000 habitants, la Seine-Saint-Denis restait devant en 2012.

"ON OUBLIE QUE LA VILLE A CONNU DES PISODES VIOLENTS BIEN PLUS MEURTRIERS"

La criminalit marseillaise a des spcificits, notamment des racines aussi profondes qu'anciennes qui associent ou opposent anciens parrains et nouveaux cads. Tous se disputent le territoire et les revenus d'un march de la drogue.

"Contrairement au trafic d'hrone dans les annes 1980, celui du cannabis aujourd'hui ncessite une importante main-d'uvre : des revendeurs, des guetteurs, des 'nourrices' [qui dissimulent la drogue chez elles contre rmunration]... La concurrence est exacerbe", observe Laurent Mucchielli, directeur de l'Observatoire rgional de la dlinquance et des contextes sociaux.

Mais "depuis deux ans, le projecteur national est braqu sur Marseille, dplore le sociologue. On oublie que la ville a connu des pisodes violents bien plus meurtriers l'poque de la French connection. En 1978, ce sont dix personnes d'un coup qui ont t assassines au Bar du Tlphone. On ragit aujourd'hui comme si les bandits du pass jouaient au pistolet eau".

Lire galement : Marseille : "La cit vous prend votre enfant" (dition abonns)

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