Ce n'est pas Lifar. Il ne se positionne pas en chorgraphe voulant faire de la compagnie son instrument, mais Benjamin Millepied entre l'Opra en artiste. Nouvelle galaxie, nouvelles mthodes, nouveaux objectifs. Il entend faire partager ses choix et ses gots et, d'abord, celui de la musique.
C'est sur ce point particulier qu'il s'est entendu avec Stphane Lissner, qui prendra ses fonctions de directeur de l'Opra en 2015. Les plus belles œuvres du XXesicle ont t cres pour le ballet, les deux hommes parlent ensemble des compositeurs contemporains auxquels ils aimeraient passer commande, des soires mixtes o l'opra ferait cho la danse, de chorgraphes (Sasha Waltz et d'autres) qui mettraient en scne des opras, de chanteurs qui entreraient dans la danse.
Une nouvelle galaxie
Benjamin Millepied parle aussi de favoriser les crations, dont le nombre diminue depuis le dpart de Gerard Mortier, afin de permettre aux danseurs de s'exprimer et de s'investir passionnment. Je voudrais qu'il y ait chaque saison d'avantage de crations, affirme-t-il. Sans que le budget explose: certaines d'entre elles seront plus lgres en dcors et en costumes. Je voudrais aussi crer une cellule chorgraphique o les danseurs puissent se frotter la difficult de mettre un ballet en scne, travailler avec un orchestre… dvelopper cet art chorgraphique qui existe ici depuis toujours.
Qu'importe si cela coince dans l'emploi du temps souvent dj dmentiel des danseurs: On modulera les programmes pour permettre ma vision artistique d'exister, prcise Benjamin Millepied. Pourquoi rester forcment sur une programmation en srie o toutes les reprsentations d'un mme programme sont donnes la suite? Il entend aussi faire partager ses gots, convier des chorgraphes de sa gnration, alors que Brigitte Lefvre, actuelle directrice de la danse, avait privilgi, tant qu'ils taient actifs, les gants du XXesicle. Benjamin Millepied veut aussi runir autour de lui des compositeurs et plasticiens soucieux de mettre l'art chorgraphique au centre de leurs crations. Bref, faire merger une nouvelle galaxie, la manire d'un Diaghilev ou d'un Cunningham.
Le futur directeur entend aussi faire partager le Ballet de l'Opra. Emmener les danseurs hors de leurs murs, dans des lieux - des muses par exemple Paris, d'autres thtres en rgion - o on ne l'attend pas. Il a dj men cette exprience avec son L.A. Dance Project.
Il a tout appris de l'Amrique. Que rien n'est impossible qui sait prendre des risques et saisir des occasions. Que l'enthousiasme, l'intelligence et le talent crent des vents plus grisants et constructifs que le fatalisme franais. Et qu'une compagnie, ft-elle classique, doit vivre avec son temps. Une nouvelle page de l'histoire de l'Opra va s'crire. Elle s'annonce passionnante. Nicolas Joel et Stphane Lissner ont russi le plus joli coup dont une compagnie puisse rver.
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